Article de Francis Deron paru dans le Monde du 15 décembre 2008 :
Abhisit Vejjajiva, le chef du Parti démocrate de Thaïlande, dans l'opposition depuis 2001, a été élu premier ministre par le Parlement, lundi 15 décembre, dans une nouvelle tentative de sortir le pays de la crise institutionnelle qu'il traverse depuis plus de trois ans. Il succède à Somchai Wongsawat, que la justice a interdit de politique, le 2 décembre, pour fraudes électorales de la part de son parti, dissous.
Le choix de M. Abhisit, 44 ans, marque le retour au pouvoir de la plus vieille formation du royaume, dont les origines remontent à la séparation des pouvoirs politiques de la fonction cérémoniale mais très respectée du trône, en 1932.
Né de parents thaïlandais, mais en Angleterre à Newcastle, et éduqué à Eton College puis à Oxford, dont il est diplômé d'économie, M. Abhisit est l'héritier d'une famille d'origine chinoise (d'ethnie hakka) qui entretient des relations étroites avec l'élite thaï du Palais royal depuis plusieurs générations.
Il s'est assuré une majorité de 235 députés contre 198 pour Pracha Promnog, candidat proposé par les partisans de Thaksin Shinawatra, l'ex-premier ministre en exil.
S'adressant à ses partisans par la voie d'une vidéo préenregistrée, depuis l'étranger, Thaksin Shinawatra a condamné pendant le week-end des "ingérences de l'armée" au bénéfice de M. Abhisit. Des protestataires pro-Thaksin, aux chemises rouges en signe de ralliement, se sont livrés à des jets de projectiles et ont mis le feu à des pneumatiques devant le Parlement avant d'être dispersés par la police.
Au cours des dernières années, le Parti démocrate – assez conservateur en dépit de son enseigne – a été relégué dans une bonne mesure à un rôle de figurant par l'arrivée du clan Thaksin dans le jeu politique.
Celui-ci avait rassemblé un électorat substantiel auprès de couches défavorisées, en milieu rural en particulier, que les démocrates avaient négligé dans la redistribution des dividendes de la croissance lorsqu'ils étaient au pouvoir dans les années 1990.
Bien implanté à Bangkok et dans le Sud, le parti de M. Abhisit doit maintenant aller à la reconquête de cet électorat qui gêne, par la voix qu'il s'est acquise, la répartition traditionnelle des intérêts entre militaires, technocrates, grands marchands et nobles de la Cour. Rude tâche pour un très jeune homme politique.
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